Statut linguistique de l'alsacien

Faut-il appeler l'alsacien une langue, une dialecte, un patois ? La distinction n'est pas, au fond, une question purement linguistique, mais elle est conditionnée par des facteurs variés, historiques, culturels, politiques.
Linguistiquement, et au vu de la façon dont les parlers germaniques continentaux se sont regroupés autour d'une série de langues, les différents parlers alsaciens constituent pour l'essentiel un dialecte dans le grand ensemble constitué par la langue allemande. Raisonnablement, si les parlers bavarois, autrichiens, suisses sont des variétés d'allemand, l'alsacien en est une aussi, de toute évidence. Il s'ajoute à cela que des textes alsaciens ont joué un certain rôle dans la genèse de la langue littéraire allemande. Ce rôle n'a pas été déterminant, mais il n'est pas nul.

Que l'alsacien soit de l'allemand n'est ni un titre de gloire, ni une tare. C'est un fait, simplement. C'est la raison pour laquelle dans ce document on parlera habituellement de l'allemand standard par opposition à l'alsacien, plutôt que de dire "l'allemand" tout court.

Si nous disons "un dialecte", nous ne voulons pas par là nier la multiplicité des formes de ce dialecte. Comme tous les dialectes vivants, l'alsacien est très variable selon les lieux. On fait classiquement les distinctions suivantes :

  • Dans une frange septentrionale et plus particulièrement aux confins de la Lorraine germanophone, on trouve des parlers franciques rhénans, qui ne seront pas pris en compte ici, parce que l'auteur de ce site ne les connait pas suffisamment. De toute façon, ils s'opposent fortement aux dialectes parlés dans la partie centrale de l'Alsace, et leur prise en compte compliquerait considérablement la détermination d'une orthographe.
  • Dans un secteur méridional proche de la Suisse, on trouve des parlers relevant du haut alémanique, qui ne seront pas davantage pris en compte ici, pour les mêmes raisons.
  • Dans le reste de l'Alsace, du moins si l'on excepte les quelques fonds de vallées qui sont romans, on parle un dialecte bas-alémanique sous des formes variées. C'est ce dialecte qui est visé par le présent site.
La variété dialectale interne de ce bas-alémanique (qui se retrouve avec des formes très proches de l'autre côté du Rhin) est suffisante pour rendre complexe la recherche d'une orthographe au moins en partie commune. Il faut en particulier tenir compte du rôle spécial joué, à l'intérieur de ce dialecte, par le parler urbain de Strasbourg, qu'on retrouve à Haguenau et dans quelques autres agglomérations plus petites. L'auteur lui-même a pour idiome maternel un parler du Ried, par rapport auquel il a tendance à situer (instinctivement) les autres parlers, mais qu'il ne considère ni comme le plus parfait ni comme la référence objective du point de vue linguistique... Il n'y a pas de "beaux" parlers ni de parlers "vulgaires", seulement des parlers différents.